Edifiant ...

Anonyme (non vérifié)

lun 05/12/2016 - 09:26

Un bel exemple de lobbying auprès des députés ... ou pourquoi on ne comprend pas toujours les tenants et aboutissants de certaines lois.

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.4447956_5835528f7e0e8.commis…

Si "faire comme nous", c'est débattre sur le fond, c'est bien le but d'un forum.

"aucun impact sur la biocénose"
Avez-vous lu cela sur notre site? De mémoire, nous avons écrit à plusieurs reprises le contraire, et exposé en détail le contenu de plusieurs articles de recherche montrant les différences de peuplement amont / aval des barrages ou bien encore avant / après restauration. Le problème ne se pose pas comme "impact ou pas impact", mais la caractérisation de l'impact, et derrière un choix démocratique : le rapport entre situation avec impact / sans impact justifie-t-il la transformation de ce qui existe? Au demeurant, c'est à peu près ce que dit le guide Eau et connaissance cité plus haut, on ne doit pas faire de la restauration car on est sûr a priori qu'on va dans le sens de l'histoire et qu'on fait du bien aux milieux, on est toujours dans une logique de diagnostic, pronostic, évaluation et concertation.

"voire même aurait un effet bénéfique sur la biodiversité"
Que des hydrosystèmes artificiels (pléonasme car quasiment tous le sont à un certain niveau) abritent parfois une riche biodiversité, c'est une évidence difficile à nier, au même titre que beaucoup d'autres hébergent une "biodiversité ordinaire", comme on lit parfois dans la littérature. Dire que toute retenue ou toute dérivation serait une catastrophe pour le vivant aquatique et riverain, c'est donc faux en toute généralité et cela fait de toute façon partie des points à démontrer (pas à asséner) dans les chantiers (inventaires de biodiversité des rivières classées bienvenus ; or même sur les poissons, on a déjà du mal à trouver des analyses d'évolution des populations sur quelques décennies).

C. Lévêque l'a dit dans l'échange du 23/11/2016 et dans ses essais, la science étudie une nature-objet (donc y compris aujourd'hui des travaux en socio-écologie, en écologie urbaine, en écologie industrielle, etc. il y a même des revues scientifiques déjà spécialisées sur l'anthropocène, bien que les géologues n'aient pas statué sur sa recevabilité). Si l'on commence à poser qu'il existe une "naturalité" qui serait "bonne" car "intègre" car "échappant à l'influence anthropique", on est dans un autre registre, avec un paradigme davantage politique, romantique ou esthétique, selon une trajectoire d'ailleurs tout à fait identifiée dans l'histoire moderne des mouvements de conservation. Mais l'ambiguïté, elle est là aussi, de quelle écologie parle-t-on au juste?

"Améliorer les dispositifs à grand rendement"
Vous pensez à quoi? Les grands barrages ne sont pas tellement améliorables au plan environnemental autrement qu'en gestion des débits / évitements des turbines, et la plupart des améliorations qu'on leur apporte en ce domaine se traduisent par une baisse de production (si on parle production d'énergie et diminution des 85% non-ENR de notre mix, ce n'est donc pas le but recherché, mais son contraire). En franchissabilité, ce sont des solutions de type transport aval-amont par route ou des ascenseurs à retours souvent peu concluants. En mécanique, les courbes d'apprentissage des turbines hydrauliques de groupes puissants sont quasi-plates depuis un certain temps, et le rendement est déjà très élevé (plus de 80% pour les Francis, de 90% pour les Pelton), l'innovation se trouve plutôt sur les petits sites (vis hydrodynamiques, microturbines) ; en électrotechnique, les progrès se font plutôt sur des vitesses variables ou faibles vitesses, qui ne concernent pas là non plus les grands ouvrages.

"Expérimenter davantage les nouveaux procédés comme les hydrauliennes"
Pourquoi pas (un moulin devrait le tester ici prochainement, sur quelques kW, si l'AFB et la DDT qu'il rencontre cette semaine ne le dégoûtent pas de l'envie de faire quoi que ce soit), toutes les innovations sont bonnes à tester. Mais l'hydraulien a forcément un petit rendement (énergie cinétique seulement + limite de Betz) ; si c'est fait à grande échelle, cela a un impact non nul sur les systèmes fluviaux (une hydraulienne prend de la place, modifie l'écoulement et ralentit par définition l'eau en exploitant son énergie, pose le pb de gestion des flottants, etc.) ; enfin, cela a un coût de revient au kWh moins intéressant que l'exploitation d'une chute, donc c'est difficile à soutenir si l'on se plaint déjà que l'hydro est trop soutenue par rapport aux prix de marché.

Il est à noter que les mêmes qui réprouvent l'énergie fluviale réprouvent rapidement d'autres formes d'énergie hydraulique quand elles commencent à prendre de l'ampleur, cf typiquement le marémoteur (critique de la Rance en France, de Fundy au Canada, de Swansea Bay au Royaume-Uni, etc.). Donc améliorer les grands barrages, l'hydraulien, les marées, la houle, les courants, etc. OK, mais en attendant la réalisation de toutes ces belles promesses qui sont déjà depuis longtemps dans les cartons et qui ont toutes des impacts environnementaux, cela évite la question posée: encourage-t-on ou décourage-t-on l'exploitation des chutes existantes, qu'elles fassent 5, 50, 500 ou 5000 kW ?

Pas besoin de lire attentivement toutes les informations sur le site « Patrimoine et Énergie hydrauliques » pour comprendre les intérêts qui y sont défendus, c’est ce que l’on appelle du lobbying…
Bon nombre d’articles s’appuient sur des interprétations orientées de publications scientifiques pour minorer les impacts des ouvrages (notamment petits) sur les cours d’eau et les écosystèmes que cela représente. Dans le fond, il s’agit juste d’une profonde remise en cause des principes de continuité, des concepts associés (corridors, trame bleue, etc.) et du bien-fondé de la préservation des cours d’eau les moins anthropisés (pour ne pas dire « sauvage » puisque le terme est usurpé).

"… des hydrosystèmes artificiels (pléonasme car quasiment tous le sont à un certain niveau) abritent parfois une riche biodiversité, c'est une évidence difficile à nier, au même titre que beaucoup d'autres hébergent une "biodiversité ordinaire »"
On en revient au concept de Zoo…La nature n’aime pas le vide, c’est tout. Dans le fond, il s’agit de décider si l’ours polaire doit s’adapter aux cocotiers, ou si on tente de limiter les dégâts avant d’arriver là (à moins que les moulins puissent alimenter les climatiseurs…).

« Mais l'ambiguïté, elle est là aussi, de quelle écologie parle-t-on au juste? » Là-dessus, chacun son point de vue, c’est de la métaphysique. Partir du constat que la Nature est idéalisée, car inéluctablement anthropisée, permet de soulager les consciences quant aux actions réalisées.

"...améliorer les grands barrages, l'hydraulien, les marées, la houle, les courants, etc. OK, mais en attendant la réalisation de toutes ces belles promesses qui sont déjà depuis longtemps dans les cartons et qui ont toutes des impacts environnementaux, cela évite la question posée: encourage-t-on ou décourage-t-on l'exploitation des chutes existantes, qu'elles fassent 5, 50, 500 ou 5000 kW ?"
Ok, là-dessus, la demande de moratoire sur le classement des cours d’eau apporte votre réponse, à défaut de question.

Julien Bigué

Profile picture for user Julien Bigué

mer 08/02/2017 - 11:00

Bonjour Hydrauxois,

Savez vous où en est le projet de loi ratifiant deux ordonnances électricité, gaz et énergies renouvelables qui permettrait à certains ouvrages d’obtenir des dérogations concernant l’obligation de restauration de la continuité écologique visée à l’art. L214-17 du CE.

Le ministère aurait commandité un rapport auprès du CGAAER sur ce sujet. Vous êtes au courant ?

Merci de votre réponse,

 

Hydrauxois (non vérifié)

mer 08/02/2017 - 12:50

En réponse à par Julien Bigué

Bonjour,

CGAAER : pas d'info.

Projet de loi : il est en adoption demain à l'Assemblée nationale et la semaine prochaine au Sénat.

Précision : nous ne sommes pas à l'origine de la proposition de dérogation à laquelle vous faites allusion, qui nous a surpris comme beaucoup. Serait-elle adoptée qu'elle aurait surtout pour effet de rendre inévitable une remise à plat plus globale, au lieu des accumulations d'exceptions et précisions qui deviennent des usines à gaz interprétatives et n'adressent pas les problèmes (au fond en très petit nombre, cf message plus haut sur ce thème).

Hervé (non vérifié)

mer 08/02/2017 - 11:28

Je remonte juste dans les post pour une info et dans un souci de clareté : le site OCE (observatoir de la continuité écologique) et l'adresse http://continuite-ecologie sont la même chose. C'est un site collaboratif en lien fort avec Charles-François Champetier (Hydrauxois). Cf tout en bas de la page qui sommes nous : L’Observatoire : Philippe Benoist (Cedepa), Charles-François Champetier (Hydrauxois)

Hydrauxois (non vérifié)

mer 08/02/2017 - 14:45

@ obi wan

"Dans le fond, il s’agit juste d’une profonde remise en cause des principes de continuité, des concepts associés (corridors, trame bleue, etc.) et du bien-fondé de la préservation des cours d’eau les moins anthropisés"

Curieux que vous le perceviez ainsi, pas la première fois que vous extrapolez. On n'est certainement pas tendre envers les promoteurs institutionnels et les lobbies de la RCE, mais notre position n'est pas et n'a jamais été l'abandon de la continuité ni l'absence de préservation des cours d'eau peu anthropisés.

C'est ce qui est le plus bizarre dans l'affaire. On a l'impression qu'il y a une incapacité un peu irrationnelle à admettre que certaines méthodes doivent être reconnues comme problématiques et donc doivent changer, sans pour autant jeter le bébé avec l'eau du bain. Comme si c'était tout ou rien.

"On en revient au concept de Zoo… La nature n’aime pas le vide, c’est tout. Dans le fond, il s’agit de décider si l’ours polaire doit s’adapter aux cocotiers, ou si on tente de limiter les dégâts avant d’arriver là (…) Là-dessus, chacun son point de vue, c’est de la métaphysique. Partir du constat que la Nature est idéalisée, car inéluctablement anthropisée, permet de soulager les consciences quant aux actions réalisées."

Décider si... peut-on si facilement "décider" de faire disparaître les 30% d'espèces nouvelles de poissons arrivées en France depuis 150 ans, les écrevisses américaines, etc. ?

La nature n'a pas seulement horreur du vide, elle a aussi horreur du sur-place. Curieusement, c'est plutôt la vision alternative qui ressemble à un zoo, non ? On a une collection d'habitats et d'espèces 'indigènes" que l'on enferme dans un zonage protégé pour que cela ne bouge plus ou quasiment plus, en tout cas sans nous. C'est l'option EO Wilson, le zoo humain enfermé sur 50% de la planète et le zoo non-humain (mais surveillé et contrôlé par lui) tout autour. Pas notre vision, mais elle a le mérite d'être claire.

Sinon et dans votre logique conservationniste, il y a eu ce papier sur les "grands tueurs" de la biodiversité
http://www.hydrauxois.org/2016/12/sur-les-grands-tueurs-de-la.html

Si l'on veut "limiter les dégâts", selon vos termes, il y a peut-être des facteurs plus urgents à traiter en 2017 que les seuils des moulins et étangs d'Ancien Régime. Car finalement, dans les causes d'érosion concrète de la biodiversité française, on n'a jamais lu une seule démonstration convaincante à ce sujet. Et comme certains d'entre vous sans doute, on a rencontré beaucoup d'anciens qui croient se souvenir que certaines rivières n'étaient pas des déserts biologiques avant les 30 glorieuses, quand les moulins étaient déjà là mais pas la pollution, la mécanisation, le béton, etc. Sur vos bassins versants, avez-vous tenté des analyses pour essayer d'objectiver cette évolution des peuplements de rivière sur le long terme ? Vos résultats confirment-ils ou infirment-ils le rôle de l'hydraulique ancienne comme facteur d'une première dégradation notable des cours d'eau ?

(On répond en général qu'il y a "plein de facteurs". Ce qui est vrai pour tout ou presque tout, le fait qu'il y ait plein de facteurs possibles du cancer du poumon n'empêche cependant pas de les isoler et d'en traiter un avec plus d'âpreté... le papier de Maxwell dit justement qu'il faudrait plutôt traiter les facteurs en proportion de leur impact avéré, et non choisir la facilité des impacts mineurs mais simples, ni céder à des modes, comme tout mettre sur le dos du réchauffement.)

"la demande de moratoire sur le classement des cours d’eau apporte votre réponse, à défaut de question"

Pas compris le rapport, c'était votre réponse à la question qui m'intéressait.

@ tous, particulièrement aux gestionnaires de rivière

Une question : d'après votre expérience, considérez-vous que la restauration de continuité écologique des rivières aurait besoin d'évolutions et si oui lesquelles?

Comme le libelle qui circule en ce moment (au nom des gestionnaires) affirme "Nous sommes par essence ouverts au débat et à la discussion", ce serait évidemment intéressant de traduire les paroles en actes dans un forum d'échange et, finalement, de comprendre les positions en présence. Sans trop de langue de bois.

"...mais notre position n'est pas et n'a jamais été l'abandon de la continuité ni l'absence de préservation des cours d'eau peu anthropisés..." Je vous renvoie donc à vos propres pages et la liste de « pamphlets » qui vantent les mérites des ouvrages sur les écosystèmes ; car il s’agit bien du débat (euh, aménagés ? , ah non pardon, « naturalisés ») : http://www.hydrauxois.org/search/label/Services rendus par les écosystèmes "... On a l'impression qu'il y a une incapacité un peu irrationnelle à admettre que certaines méthodes doivent être reconnues comme problématiques et donc doivent changer, sans pour autant jeter le bébé avec l'eau du bain. Comme si c'était tout ou rien... En effet, vos articles mettent en évidence les problèmes que soulèvent dans certains cas la « mise en conformité des ouvrages ». Certes, il y ‘a des cas particuliers, certes toutes les situations ont leur contexte et certaines ont visiblement dégénéré en conflit regrettable ; mais absolument d’accord, il ne faut pas tout jeter à la poubelle, y compris la restauration de la continuité écologique (ne vous déplaise, la demande de moratoire sur le classement des cours d’eau est un appel à l’affaiblissement de ce principe). Après tout, c’est un propre de notre société de toujours mettre en avant ce qui ne fonctionne pas, et trop rarement ce qui fonctionne. "... Si l'on veut "limiter les dégâts", selon vos termes, il y a peut-être des facteurs plus urgents à traiter en 2017 que les seuils des moulins et étangs d'Ancien Régime..." Je ne pense pas que l’un empêche l’autre, puisque il y’a « plein de facteurs ». En quoi le travail sur la continuité écologique empêcherait le travail sur l’amélioration chimique des eaux ?

"Je vous renvoie donc à vos propres pages et la liste de « pamphlets » qui vantent les mérites des ouvrages sur les écosystèmes"

Nous avons écrit en reprenant la liste des "services rendus par les écosystèmes" au sens donné à ce concept depuis le Millennium Ecosystem Assessment:
http://www.hydrauxois.org/2015/12/idee-recue-09-seuils-digues-et-barrag…

Lisez bien ce texte, vous verrez qu'il reconnaît des points négatifs par rapport aux ouvrages.

Côté gouvernance, il faut quand même revenir un peu aux choix vraiment opérés. La loi de 2006 a en tout et pour tout demandé d'équiper ou de gérer des ouvrages là où il y a un problème avéré de migrateur ou de sédiment. La loi de 2009 TVB a demandé l'étude d'aménagement des obstacles les plus problématiques. Le DCE cite la continuité de la rivière dans son annexe, parmi les éléments de qualité morphologique, sans aucune prescription particulière sur les solutions à adopter ni le périmètre fonctionnelle de la connectivité à restaurer. Le MEA des Nations-Unies, cité ci-dessus, approche les écosystèmes en fonction du bien-être humain, et non pas dans une logique de valeur intrinsèque de la nature renaturée où toute influence humaine aurait disparu.

Donc ni les syndicats ni (surtout) les administrations ne sont fondés à voir dans ces arrière-plans un accord démocratique pour une politique de renaturation complète des rivières, ce n'est ni le texte ni l'esprit des lois ou des grandes orientations politiques de nos démocraties. Eliminer, réduire ou compenser (au cas par cas) les impacts des ouvrages : oui. Affirmer qu'il existe un objectif national, européen ou international d'une rivière avec zéro ouvrage et un idéal partagé de rivière sauvage: non.

"Certes, il y ‘a des cas particuliers, certes toutes les situations ont leur contexte et certaines ont visiblement dégénéré en conflit regrettable"

Le pb de base va au-delà du "contexte" dont vous parlez : aucun succès n'est possible sur l'ensemble des sites concernés en disant aux gens "détruisez votre bien ou dépensez quelques dizaines / centaines de milliers d'euros". Ce discours peut marcher quand il y a des leviers ou des MO solvables (=ouvrages appartenant à des collectivités, gérés par organismes publics ou fédés de pêche, industriels dépendant de l'obligation d'achat, particuliers sans intérêt pour l'ouvrage déjà à moitié détruit ou dont le droit d'eau est cassé ou ayant peur du gendarme DDT-M). Mais une fois que vous avez épuisé ces premiers cas "faciles" (les chantiers engagés depuis le PARCE 2009 et le classement 2012), vous buttez sur les autres.

On n'a toujours pas le rapport CGEDD ni des chiffres nationaux (ministère et agences sont peu diserts sur le bilan chiffré d'ensemble), mais il y a ici par exemple 340 ouvrages en rivières classées dans l'Yonne et le Préfet a reconnu fin 2016 que 17 seulement ont été mis en conformité à date. Ce n'est pas ce que l'on appelle une réforme qui rencontre un vif succès avec quelques ratés !

"En quoi le travail sur la continuité écologique empêcherait le travail sur l’amélioration chimique des eaux?"

En tout cas, il faut se poser la question, la Commission européenne vient de publier son suivi de la politique environnementale française (en lien pdf ci-après), et elle pointe de nouveau nos retards dans le domaine de l'eau : 44% des ME de surface en bon état chimique et écologique (ce devait être 66% en 2015), reproche explicite de trop tarder sur les nitrates et les pesticides, aucune mention d'une hypothétique nécessité de supprimer 20 K obstacles pour arriver à répondre aux objectifs posés.
http://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-28418-rapport-france.p…

Aujourd'hui, quand un syndicat met 10 ou 20% de son budget sur la continuité alors que les ME de son bassin sont toujours dégradées sur le compartiment physico-chimique ou sur le compartiment chimique, et qu'aucune perspective claire n'est donnée sur la capacité de mettre un terme à cette dégradation, quelle est la rationalité de ce choix? Ou pour le dire autrement : a-t-on des exemples validés où une rivière en mauvais état DCE est devenue en bon état DCE après intervention sur la morphologie? Quand des chercheurs avaient testé cette hypothèse, leur étude montrait qu'une masse d'eau sur 24 seulement avait atteint le bon état DCE après travaux en restauration morphologique (Haase et al 2013 ci-après). Cela justifie quand même que l'on examine les choses de plus près, sans langue de bois en disant "tout se passe bien, nos actions sont formidables, les rivières vont mieux"
http://link.springer.com/article/10.1007/s10750-012-1255-1

PS : et ce que Haase et al 2013 demandent (avec bien d'autres), ce n'est jamais que ce que nous demandons aussi depuis plusieurs années : "We emphasize the need for advanced restoration strategies based on catchment analyses considering water pollution, source populations, and dispersal capacities of sensitive species, and recommend the inclusion of additional parameters, including societal and stakeholder perspectives, in assessing the initial success of restoration projects". La continuité comme élément parmi d'autres de la morphologie ne peut pas être une mesure plaquée et déconnectée des autres enjeux de gestion de la rivière, que l'on fait machinalement pour faire du chiffre d'ouvrage effacé ou aménagé en réponse à un mot d'ordre préfectoral et à une ligne budgétaire agence, ce doit être une mesure dont le sens découle d'objectifs écologiques prédifinis en priorisant les impacts qui écartent de ces objectifs et en analysant les coûts / la faisabilité / l'acceptabilité des chantiers nécessaires. Dans certaines rivières, la continuité apparaît certainement comme priorité, dans d'autres elle est probablement sans grand intérêt. Peut-être que certains d'entre vous ont procédé ainsi sur leur bassin versant. Sur les nôtres, non, on n'a jamais eu cette vision d'ensemble, on n'a jamais été intégrés en amont pour que l'ensemble des propriétaires et riverains d'ouvrages donnent des avis et co-construisent des solutions, on n'a jamais eu de réponse préfectorale ou Misen à notre demande de concertation généralisée, qui date pourtant du classement lui-même (là encore, lisez ce dossier en lien ci-après et vous verrez qu'on y parle modernisation écologique des ouvrages, sans exclure leur effacement. Si l'on avait rencontré une réelle volonté de concertation à l'époque, et non le silence, l'absence de débat de fond et le harcèlement des adhérents site par site, à vouloir casser leur droit d'eau ou ne financer que la casse de leur seuil, les choses auraient évolué différemment...)
http://www.hydrauxois.org/2013/02/continuite-ecologique-en-cote-dor-le…

obi wan (non vérifié)

ven 10/02/2017 - 10:14

Pour revenir au débat, « j’ai mal à ma continuité écologique» .Voilà en résumé un bel exemple de lobbying rondement mené de la part des « amis des moulins and co », digne des plus belles enquêtes d’Elise Lucet… :

Phase 1 : désinformer et manipuler le public : Rien de plus facile, il suffit de s’afficher « patrimoine » ou « observatoire » pour se donner une image vertueuse et une légitimité à traiter de tous les sujets. Ainsi, sous une apparence noble, des arguments anti-continuité fleurissent pendant des années sans émouvoir la communauté scientifique ni ceux qui ont décliné son application…

Phase 2 : s’adjoindre la participation de « scientifiques émérites » en mal de reconnaissance pour enfoncer le clou, puisque le tapis rouge est déroulé ; en point d’orgue la réception de ces derniers, accompagnés d’un représentant du lobby « mouliniste », lors d’une table ronde à l’assemblée nationale où aucun contradicteur n’est présent pour stopper la parodie d’exposé scientifique.

Phase 3 : s’appuyer de cette nouvelle légitimé pour finir de convaincre les sénateurs et députés des dégâts issus de cette continuité, du risque de destruction massive du patrimoine naturel de l’ époque napoléonienne, et surtout du gâchis de potentiel d’énergie verte en ces temps de greenwashing…Le résultat ne tarde pas avec les premiers assouplissements de la règlementation, puis au final un régime dérogatoire pour ces ouvrages patrimoniaux, même si non fonctionnels.

Phase 4 : l’avenir nous le dira... c’est vrai, pourquoi s’arrêter en si bon chemin ? A la veille des élections, les livres blancs se succèdent notamment de la part des hydro-électriciens, curieux non ? Pourquoi se passer d’un formidable potentiel énergétique vert ?(rentable ?... c’est encore à voir). Pourquoi seuls les moulins feraient exception ?...

Comme on dit, on a ce que l’on mérite

"Pour revenir au débat"

En fait non: vous ne revenez pas au débat, vous ne répondez pas aux points avancés dans les présents échanges, vous construisez simplement un story telling qui vous rassure, où l'insinuation et la supposition remplacent désavantageusement l'argumentation.

Ce que vous décrivez est un phénomène assez courant : une réforme mal conçue, mal concertée, mal dimensionnée, mal financée, qui se heurte à la réalité de terrain et doit se réajuster. Lot commun de toute bureaucratie, la bureaucratie environnementale ne fait pas exception. Pratiquer le déni de réalité est une résistance aux changements nécessaires, et aussi une réduction des dissonances cognitives.

Pour les phases suivantes, on a le choix entre :
- une évolution concertée de la continuité écologique à partir de son bilan objectivé depuis 2006 (nous y sommes favorables, pas d'abandon de la continuité mais redéfinition périmètre, méthode, finalité avec intégration des autres enjeux déjà prévus par la loi dans la notion de "gestion durable et équilibrée")
- la multiplication illisible des retouches, exceptions, passe-droits, etc. par amendements plus ou moins inspirés (nous y sommes défavorables, mais c'est le seul moyen démocratique d'avancer, avec le contentieux judiciaire, quand l'administration pratique la sourde oreille).

La DEB, les Agences et les Préfectures de bassin ne veulent pas de l'option 1 pour le moment, libre à elles. Les mêmes causes produiront les mêmes effets. Ce que vous ne comprenez pas : en refusant de reconnaître sincèrement les problèmes posés par la mise en oeuvre de la continuité et de prendre en compte les objections diffuses à une certaine vision monolithique de l'avenir des rivières, vous multipliez le risque d'une évolution adverse, à savoir mettre un terme de manière brutale à un "machin" qui paraîtrait incapable de se réformer.

Allons, allons, revenez quelques posts plus haut, et vous verrez que sommes bien dans le sujet. L'acte de lobbying est là, c'est "un phénomène assez courant", allez donc voir la définition du terme, pas la peine d'en rougir.

"Ce que vous ne comprenez pas : en refusant de reconnaître sincèrement les problèmes posés par la mise en œuvre de la continuité et de prendre en compte les objections diffuses à une certaine vision monolithique de l'avenir des rivières, vous multipliez le risque d'une évolution adverse, à savoir mettre un terme de manière brutale à un "machin" qui paraîtrait incapable de se réformer."
Des problèmes posés par la mise en œuvre existent, oui. Vous reprochez aux autres le déni, ne faites pas de même.

Pour le futur, si cela vous amuse de spéculer, un petit bonhomme vert avec une canne et des oreilles pointues a dit "...difficile à voir, toujours en mouvement est l'avenir"...

Hydrauxois (non vérifié)

ven 10/02/2017 - 21:02

En réponse à par obi wan (non vérifié)

"L'acte de lobbying est là, c'est "un phénomène assez courant", allez donc voir la définition du terme, pas la peine d'en rougir."

Pas de souci: Hydrauxois défend une certaine vision de la rivière, souhaite des évolutions de la politique publique en ce domaine, expose ses arguments au débat et tient le même discours à tous ses interlocuteurs. On peut appeler cela du lobbying si l'on veut. D'autres structures associatives, syndicales ou économiques font de même. Mais la matière principale du débat n'est pas là, il faut dire en quoi l'on est d'accord ou pas d'accord avec le contenu des actions / propositions des groupes d'influence ou d'intérêt.

"Des problèmes posés par la mise en œuvre existent, oui."

Pouvez-vous préciser lesquels ? Des problèmes sur...
...consentement du propriétaire aux solutions proposées?
...coût et solvabilité ?
...réalisme en nb ouvrages à traiter et délai?
...acceptabilité sociale des riverains ou usagers?
...difficulté à convaincre des services rendus par effacements?
...rigueur du diagnostic écologique avant chantier, et du suivi après?
...sérieux des grilles multicritères patrimoine/paysage/énergie/usages et des analyses coût-avantage?
...transparence des découpages du classement et de leur motivation scientifique?
...gouvernance, dialogue environnemental et bonne intégration des principaux concernés?

Ce sont quelques-uns des points qui nous chagrinent avec nos consoeurs associatives moulins / riverains des rivières L2, et vu comment nos expériences sont assez partagées, ainsi que (partiellement) rapportées dans quelques études d'observateurs indépendants, on se demande comment un texte circulant en ce moment peut affirmer que la réforme se passe très bien en dehors de quelques cas isolés. On verra ce qu'ont observé les auditeurs du CGEDD dans le rapport qui, mystérieusement, est coincé depuis un mois dans un tiroir du ministère.

"Pouvez-vous préciser lesquels ? Des problèmes sur... "
Je n’ai pas la prétention de pouvoir répondre à toutes ces questions, et franchement il s’agit du ressort des gestionnaires, alors posez leur directement la ou les questions (ah, oui c’est vrai, il nous vous répondent pas ; ou alors la réponse ne vous convient pas, donc vous reposez la question…). Si on en croît ce qui est relayé par vous et vos consœurs qui défendent une certaine vision de la rivière, c’est surtout l’acceptabilité sociale des riverains ou usagers qui semble poser le plus de problèmes, surtout quand vous les exacerbez.

Pour les autres aspects et critères d’acceptabilité, il s’agit des points plus techniques et/ou financiers qui en général vous échauffent car demandent des efforts ou des justifications. Comme il a déjà été dit plus haut, vous pouvez continuer à demander toujours plus d’analyses, de transparence, de diagnostics…le Vivant ne se met pas sous équation, pas plus les rivières que les humains.
Si vous jugez que vos actions et raisonnements sont "propres" et tombent sous le sens, je comprends que vous criez au scandale dès qu’on vous demande des contreparties ou des compensations. Bref, vous défendez vos intérêts, ça se comprend…mais au final, quand vous reprochez les "dogmes", les discours "monolithiques ", vous faites pareil.

Hydrauxois (non vérifié)

sam 11/02/2017 - 12:42

@gh (la page précédente devenait trop étroite pour répondre)

"En associant sciemment dans une phrase "milieu artificiel" et "endémisme", vous êtes pleinement conscient des raccourcis que les gens risquent de faire derrière, même si vous arguez le contraire. Ou alors, pourquoi ne pas avoir remplacé le mot « endémique » par « exotique envahissante », par exemple dans votre discours… ? Là on commencerait à être un peu plus en phase..."

Pas compris ce point. Nous serions certainement "en phase" si vous reprenions tous vos arguments, mais il se trouve que nous défendons les nôtres. Que des lacs, retenues ou étangs abritent des espèces dites exotiques ou envahissantes, oui, certainement, le cas est souvent rapporté dans la littérature. Cela n'implique pas qu'ils ne puissent pas aussi profiter à des espèces endémiques (il faudrait regarder les ZNIEFF et Natura 2000 sur des plans d'eau d'origine anthropique, par exemple) et cela ne nous informe pas sur leur biodiversité. Vous tapez "novel ecosystems" sur Scholar, vous avez plus de 600.000 résultats : l'enjeu n'est-il pas de connaître aussi ces écosystèmes créés par l'homme?

"concernant la deuxième partie de votre argumentation, qui êtes-vous pour prétendre que l'examen au cas par cas n'est pas traité ? Que des études initiales concernant la biodiversité ordinaire ne sont jamais réalisées... ? Je vous avoue que ce type de discours un peu moralisateur limite populiste et en tout cas généraliste, simplificateur et surtout faux me déprime un peu et démontre surtout un manque d'arguments et d'honnêteté intellectuelle. Peut-être que certains cas se sont effectivement passés comme vous le décrivez, mais c'est loin d'être une généralité, je vous assure. En tout cas, je suis pressé de vous l'entendre raconter en face de gens dont c'est le métier, justement... ça promet des échanges croustillants ;-)"

Eh bien nous n'avons jamais lu de tels inventaires de biodiversité des rivières de la part de l'ensemble des intervenants de notre région (Yonne-Cure-Cousin, Seine et affluents, Armançon et affluents, Serein et affluents). Nous l'avons demandé sur certains chantiers (en phase préparatoire ou en enquête publique) et cela n'a pas été suivi d'effet.

Plus largement, dans les SAGE ou contrats rivières ou études diagnostiques de BE que nous avons eu l'occasion d'étudier, nous n'avons jamais vu de programmation de tels inventaires, en particulier à fin d'évaluer l'impact des hydrosystèmes artificiels au-delà des poissons. Nous avons déjà croisé quelques inventaires de l'avifaune de rivières, par exemple, mais généralement dans d'autres cadres (LPO, chasseurs) que la réflexion sur la gestion de cours d'eau. De même, il arrive que l'on trouve des inventaires floristiques quand une zone est classée à proximité d'un projet ou des IBGN sur chantier, etc. Mais cela n'apporte pas à proprement parler la réponse à notre interrogation : où sont les travaux d'inventaire du patrimoine naturel permettant de caractériser les rivières régulées / non régulées d'un bassin sur les poissons, oiseaux, mammifères, amphibiens, flore riveraine, etc. et de comprendre leur différence? Comment fonde-t-on aujourd'hui factuellement l'analyse de la diversité du vivant dans les bassins versants et des différents impacts qui la font varier dans telle ou telle direction (en particulier, pour le sujet qui nous intéresse et sur lequel nous sommes un peu sceptiques, l'effet observé sur le vivant des étangs, retenues, biefs, lacs et autres masses d'eau d'origine artificielle)?

A vous entendre, l'exercice serait très courant en France. Le plus simple est donc de nous donner ici plusieurs liens pdf de tels travaux, qui nous intéressent beaucoup pour analyser leurs résultats, et plus encore leurs méthodes.

Merci d'avance.

PS : "populiste, généraliste, simplificateur, moralisateur, faux, manque d'argument et d'honnêteté"... ouh la la calmez vous, déjà rédigé pas mal de feuillets rien qu'ici pour répondre aux points des uns et aux autres, pas l'impression qu'on choisit la manière Trump dans l'échange!

Bonjour,
Je vais être contraint d'arrêter cette conversation avec vous, malgré le côté passionnant de ce sujet. J'en suis navré.
Pour vous répondre il faudrait que je passe des heures et des heures à reprendre point par point vos arguments et commentaires.
Je n'ai désormais ni l'envie ni le temps "libre" nécessaire pour m'étendre sur ces dialogues qui tournent en rond et dialoguer avec quelqu'un qui reste sur ces a priori... ! Honnêtement, vous avez une capacité assez remarquable de vous étendre sur des sujets que vous ne maîtrisez pas. Ça va peut-être vous surprendre mais l'écologie de la restauration ne se résume pas à "'3" publications anglo-saxonnes qui tournent en boucle sur les réseaux sociaux. Ce sont aussi des rapport d"étude, des discussions, des colloques, des réunions entre-acteurs...du "bon sens" !
Je vous laisse donc le mot de la fin puisque tel est votre objectif et laisserai le soin à chaque lecteur de se faire sa propre opinion.
Bien à vous.

Hydrauxois (non vérifié)

mer 15/02/2017 - 01:19

@ obi wan et gh

OK, ne relançons pas la discussion qui il est vrai tournerait un peu en rond avec des accusations symétriques sur nos a priori ! Je ne vous réponds donc pas en détail sur les dernières assertions (pour mémoire, on n'est pas du tout d'accord sur l'importance de la science proprement dite!).

Le débat de fond sur l'écologie est le plus intéressant et va durer de tout façon, mais ce n'est pas le premier problème concret qui se pose à nous. Le "bon sens" nous dit qu'on ne réussira pas à intégrer la continuité écologique longitudinale en routine si l'on persiste à poser un objectif prioritaire d'effacement et exercer des pressions (règlementaires, financières) à cette fin. Ce n'est pas un mode de gestion durable que de créer de telles tensions diffuses. Et cela ne sert à rien de nier le fait que l'ouvrage hydraulique, sa chute et sa retenue renvoient encore, pour beaucoup de gens, à autre chose qu'à la sèche définition d'"obstacle sans usage". On a fait le test à grande échelle depuis le PARCE 2009 et le classement 2012-2013, cela marche dans certains cas, pas dans d'autres. On parle beaucoup de "gestion adaptative" dans la littérature sur les rivières, c'est donc le moment de passer des mots aux actes et de s'adapter aux observations sur les réussites, les échecs, les freins. Sans se dire "laissons passer un peu de temps et renforçons la pédagogie, tout le monde finira pour être convaincu par la seule et unique solution". Admettons plutôt que les gens n'ont pas les mêmes attentes, que les coûts d'aménagement et désaménagement rendent ces questions non triviales, que la continuité écologique doit apprendre à composer avec d'autres continuités (symboliques, historiques, sociétales) et qu'elle n'est de toute façon qu'un des nombreux outils d'amélioration des milieux, même au sein de la morphologie.

L'effacement est une option parmi d'autres, elle peut s'exercer sur des ouvrages pour lesquels propriétaires et riverains n'expriment pas d'attachement (il y en a quand même déjà un certain nombre, buses, petite hydraulique agricole et anti-érosive devenue désuète, moulins dont le droit d'eau est caduc et le MO sans projet, etc.). Quand il n'y a pas ce consensus, il faut admettre la nécessité de trouver et financer d'autres solutions : elles ne seront certes pas optimales sur la libre circulation, mais permettront malgré tout d'augmenter les passages et les brassages. Ce que ces solutions perdent en efficacité par rapport à l'objectif écologique, elles le gagnent sur d'autres dimensions (paysage, patrimoine, etc.), des dimensions qui n'ont pas à être méprisées car elles font partie de la vie des riverains et de l'histoire des rivières. C'est sûrement plus cher en moyenne de faire une bonne solution de franchissement que de faire venir la pelle pour tout raser en 24 h, raison pour laquelle il faut aussi être plus strict dans la définition des priorités, agir d'abord là où il y a des espérances raisonnables de gains piscicoles d'intérêt, des noeuds importants de connectivité du réseau, des menaces locales d'extinction, des rivières n'ayant pas de grands barrages sans projet, etc.

Bref, pour terminer sur une note positive, il n'y a pas de raison non plus de désespérer complètement de l'avenir de la continuité écologique !

Amidala (non vérifié)

mer 15/02/2017 - 15:27

En réponse à par Hydrauxois (non vérifié)

"Bref, pour terminer sur une note positive, il n'y a pas de raison non plus de désespérer complètement de l'avenir de la continuité écologique !"

C'est vrai, tout est encore possible finalement...

Obi wan (non vérifié)

mer 15/02/2017 - 20:18

"Tout est possible", surtout le pire !
En quelques mois, les amendements "montagne", "biodiversité", "énergie", et le dernier en date, l'exonération des moulins à la mise en conformité en L2 ont torpillé l'ex Continuité Écologique....
A quand la suite ? On peut imaginer un vaste programme de construction de micro-centrales napoléoniennes, de barrages EDF patrimoniaux, de retenues agricoles refuges de biodiversité et de réservoirs d'eau pour neige de culture intellectuelle... l'eau un bien public ? - Ça dépend des intérêts privés en jeu. Bravo les lobbies vous avez de beaux jours devant vous !

"Torpiller", le mot est excessif.

Le dernier texte en date est curieux et pose certainement divers problèmes, dont nous soulignons quelques-uns.
http://www.hydrauxois.org/2017/02/les-moulins-producteurs-sont-exemptes…

Mais les précédentes évolutions ne changeaient rien de substantiel, pour ce qui est de la mise en oeuvre. Il semble reconnu par l'administration qu'il y a 20.000+ ouvrages et qu'on essaie d'en traiter 5000 par programme d'intervention + ou - quinquennal des Agences, pas la peine de s'appeler Cédric Vilani pour voir que le délai initial de 5 ans n'avait pas de sens. Quant à rappeler avec solennité que le patrimoine protégé... doit être protégé, c'est une belle tentative mais les acteurs du dossier ont acquis quand même un certain esprit critique face aux enfumages.

Certes, chacun peut incriminer les lobbies (ceux qui ont promu la réforme, ceux qui la combattent) mais pensez tout de même à en parler aussi au ministère (bureau des milieux aquatiques) qui est en charge de la bonne exécution des lois et de la bonne conception des réglementations. Proposer des gadgets comme la charte des moulins au lieu d'une concertation sérieuse pour une nouvelle circulaire d'application de la RCE, cela mène tout droit aux deux seules voies disponibles: parlementaire pour changer la loi, judiciaire pour changer la jurisprudence. Face à un mur (administratif), on le contourne, il reste heureusement un peu d'équilibre des pouvoirs, même dans notre pays si porté à vanter toute l'autorité exécutive...

On peut continuer ainsi longtemps (plusieurs sénateurs ont déjà exprimé leur souhait de le faire) et en effet, il ne restera sans doute pas grand chose de lisible à l'arrivée si cela procède par réformettes incessantes. Ce n'est pas notre souhait. On peut aussi décider de travailler en bonne intelligence, admettre l'existence de certains problèmes et co-définir leurs solutions. A nouveau, puisque chacun se défend de ne surtout pas être dogmatique, que les protecteurs du patrimoine, défenseurs du paysage et promoteurs de l'énergie reconnaissent l'intérêt de la continuité, que les restaurateurs de la continuité reconnaissent l'intérêt du patrimoine, du paysage et de l'énergie, que l'on regarde où sont les intersections de ces reconnaissances mutuelles. Si certains acteurs n'y arrivent pas et qu'au fond ils ne souhaitent aucun compromis (car ils veulent bel et bien une rivière où l'on a rasé quasiment tous les ouvrages ou alors une rivière où l'on ne touche à aucun ouvrage), eh bien ils s'excluront probablement d'eux-mêmes et se condamneront au superbe isolement de leur radicalité.

Votre grille un peu binaire du bien public contre l'intérêt particulier, c'est mal parti pour servir de base ouverte de dialogue. Un "bien public" que pas un député et pas un sénateur (y compris du groupe écologiste) ne considère comme offensé ou menacé quand il est question de ne pas casser les moulins... il faut peut-être commencer à se demander si ce bien public ne serait pas une vision un peu isolée, voire un peu partisane, de l'avenir de la rivière. Et tout un tas de minorités qui se proclament seules représentantes de l'intérêt général avec des définitions divergentes, cela devient un peu compliqué.

On a un texte de la partie législative du code de l'environnement qui précise ce que sont les orientations d'une "gestion équilibrée et durable" de l'eau. C'est l'article L 211-1. Lisez-le ou relisez-le attentivement, vous verrez que les représentants des citoyens (en cela dépositaires de la volonté générale, à ce qu'il paraît dans une démocratie) y ont intégré beaucoup de choses. Certains rêveraient peut-être de faire disparaître ceci ou cela, mais non, tout y est ensemble
https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do;jsessionid=15836843…

obi wan (non vérifié)

jeu 16/02/2017 - 11:56

En réponse à par Hydrauxois (non vérifié)

Si "torpiller" vous parait excessif, j’ai bien fait de ne pas utiliser "atomiser" alors !

Trêves de plaisanteries, le débat dans le fond est en effet stérile car les parties pris et intérêts défendus sont par nature incompatibles. Ce n’est plus de la science ou de la technique, c’est de l’idéologie, ou de l’écologie de comptoir. Néanmoins, on observe un léger adoucissement dans votre discours actuel qui est pour le moins surprenant. Alors que nombres de vos articles et pages ont fait l’apologie des « systèmes hybrides de l’anthropocène » (avec un score de 30 au scrabble) et la critique ouverte de la mise en œuvre de l’ex-politique RCE ; vous affichez maintenant un discours plus mesuré sur cette dernière en lui reconnaissant des atouts (ce qui est plutôt conservateur !)

Sinon, le renvoi à l’article L.211-1 correspond bien en cela à votre description de politique "fourre-tout" qui est contradictoire à plus d’un titre.
Par exemple , en ce qui concerne la gestion qui doit prendre en compte les adaptations nécessaires au changement climatique et vise à assurer :
« 5° bis La promotion d'une politique active de stockage de l'eau pour un usage partagé de l'eau permettant de garantir l'irrigation, élément essentiel de la sécurité de la production agricole et du maintien de l'étiage des rivières, et de subvenir aux besoins des populations locales ; »
Celui-ci est particulièrement tourné et peut même faire sourire puisqu'il précise le « maintien de l’étiage » alors que le terme adéquat serait « soutien d’étiage ». On peut en effet penser qu’il faut œuvrer au maintien d’un écoulement réduit en période estivale dans les rivières… les usagers situés en aval diront merci à cette belle solidarité !!!
« 7° Le rétablissement de la continuité écologique au sein des bassins hydrographiques. » Celui-ci vient tout simplement en opposition du « 5° La valorisation de l'eau comme ressource économique et, en particulier, pour le développement de la production d'électricité d'origine renouvelable ainsi que la répartition de cette ressource ».

Je vous passe les autres dispositions qui voudraient au final satisfaire tous les usagers… A ménager la chèvre et le choux, on se retrouve avec un « machin » qui n’a plus aucun sens et pourrait se résumer en « la gestion vise à assurer tous les usages, bon courage ! »

"A ménager la chèvre et le choux, on se retrouve avec un « machin » qui n’a plus aucun sens"

Mais ce machin... c'est le reflet de la société dans sa diversité et sa complexité !

"nombres de vos articles et pages ont fait l’apologie des « systèmes hybrides de l’anthropocène » (avec un score de 30 au scrabble)"

La question des rivières hybrides (selon l'expression de L. Lespez années 2010) ou des rivières comme anthroposystèmes / sociosystèmes (Programme environnement, vie et sociétés du CNRS, années 1990) relève d'abord du constat de fait. Les propriétés physiques, chimiques et biologiques des écoulements ne sont plus l'effet spontané de la nature sans l'homme, mais de la nature telle qu'elle a été et est encore modifiée par l'homme. Grâce à la paléo-écologie et paléobiologie, ainsi qu'à l'histoire environnementale, on mesure de mieux en mieux l'ancienneté des altérations humaines tout en essayant de mesurer aussi de manière plus précise l'ampleur relative de l'accélération récente (depuis le XXe siècle, surtout depuis 1950).

Après, cette approche ne signifie évidemment pas que toute modification est souhaitable ni bénéfique ni éternelle. Elle nous fait réfléchir au-delà de l'opposition naïve entre la (gentille) nature et le (méchant) humain, car il y a toujours des humains qui modifient la nature dans telle ou telle direction, en fonction de leurs représentations et de la construction sociale de leurs besoins. Un chantier de renaturation est de ce point de vue une expression de l'Anthropocène comme une autre. Elle nous dit aussi qu'il faut être prudent quand on choisit une "référence" du vivant pour fixer ses objectifs d'action écologique, car l'état de référence en question peut déjà être un état modifié (on cite souvent des erreurs notables en conservation, comme des espaces protégés en forêt tropicale vierge alors qu'on s'est aperçu que la zone était défrichée régulièrement par brûlis à l'époque amérindienne).

Pour la réforme de continuité stricto sensu, qui répond d'abord à une approche fonctionnelle (les conditions de la migration, de la sédimentation), nous n'avons pas de raison d'être contre a priori. Seuls les analyses de bassins permettent de diagnostiquer les discontinuités et leurs effets, de pronostiquer ce que produirait des défragmentations, de débattre de l'intérêt du résultat avec les parties prenantes de la rivière. En général, on prend soin de préciser que c'est la "mise en oeuvre française" ou "l'interprétation administrative" de la continuité qui nous pose souci (par ses méthodes et sa gouvernance), mais pas la continuité elle-même comme l'une des grilles d'analyse de / intervention sur la dynamique des rivières.

Donc si tous les moulins de France (pas seulement en rivière classée) avaient des règles de gestion ou des équipements permettant d'assurer quand nécessaire la continuité (idéalement de manière réversible, au cas où le bilan local se révèle finalement négatif après suivi de la réponse du milieu, suivi non limité aux poissons), ce serait mieux en soi. Si la réforme avait visé cela, au lieu de tout de suite dire que la vraie ambition était de "renaturer" complètement par disparition des ouvrages et zones lentiques associées, il n'y aurait sans doute pas eu de problème majeur. Vous savez, Hydrauxois est née d'un événement très précis et daté, une fin après-midi dans une réunion de mairie, au moment où des représentants de l'Agence de l'eau Seine-Normandie ont dit clairement à leurs interlocuteurs que leur seul engagement serait la destruction d'un barrage et que pas un centime ne serait dépensé pour autre chose. Auraient-ils entendu un discours moins dogmatique que les citoyens présents n'auraient pas forcément éprouvé la nécessité de créer une association dédiée à protéger le patrimoine face à ce qui se présentait comme une entreprise de destruction systématique, et non d'aménagements concertés. On espère simplement que lesdits représentants (et les membres de la DEB qui ont posé cette doctrine administrative dans les années 2000) se mordent aujourd'hui les doigts d'avoir adopté une posture aussi agressive...

Comme dit plus haut, je ne reviens pas sur « la (gentille) nature et le (méchant) humain » et vous laisse à l’écologie de comptoir.

" Pour la réforme de continuité stricto sensu, qui répond d'abord à une approche fonctionnelle (les conditions de la migration, de la sédimentation), nous n'avons pas de raison d'être contre a priori. Seuls les analyses de bassins permettent de diagnostiquer les discontinuités et leurs effets, de pronostiquer ce que produirait des défragmentations, de débattre de l'intérêt du résultat avec les parties prenantes de la rivière. En général, on prend soin de préciser que c'est la "mise en oeuvre française" ou "l'interprétation administrative" de la continuité qui nous pose souci (par ses méthodes et sa gouvernance), mais pas la continuité elle-même comme l'une des grilles d'analyse de / intervention sur la dynamique des rivières. "

Je vous renvoie donc, comme précédemment, à vos propres pages ou celle de vos consœurs qui n’affichent pas toujours cette humble transparence
Par exemple, un bel exemple d’exposé « scientifique » diraient certains (j’aimerais connaitre les références ;) :
http://continuite-ecologique.fr/services-rendus-par-les-hydrosystemes-b…

Puisque vous vous affichez dépositaires de l’Intérêt Général et paraissez si préoccupés du bien-être des citoyens, j’espère que vous penserez à partager vos dividendes issus de la production d’hydro-électricité ;)

Il faudrait en effet construire une grille d'évaluation des services rendus par les écosystèmes aménagés / renaturés. Une grille concertée dans sa méthodologie. Cela éviterait que les élus se trompent ou soient trompés. Tenez, puisque vous aimez les références, un article qui cite un travail universitaire sur les supposés bénéfices importants de la restauration d'une rivière:
http://www.hydrauxois.org/2016/12/touques-comment-le-lobby-de-la-peche-…

"Puisque vous vous affichez dépositaires de l’Intérêt Général et paraissez si préoccupés du bien-être des citoyens, j’espère que vous penserez à partager vos dividendes issus de la production d’hydro-électricité ;)"

Nous n'avons pas un public très industriel dans nos adhérents. Vous souhaitez donc nationaliser l'énergie et revenir au modèle EDF 1946? Pourquoi pas (cela va être compliqué sans sortir de l'Europe), mais c'est assez indépendant du débat. Ce qui est bien en démocratie, c'est que l'on peut monter sur un tonneau (ou écrire sur un forum) et proclamer qu'il est d'intérêt général d'interdire ou d'autoriser ce que l'on veut. Ce qui est également bien en démocratie, c'est qu'il faut un long chemin pour obtenir gain de cause et que si cette cause se révèle une erreur lorsqu'elle est mise en application, on peut revenir en arrière.

obi wan (non vérifié)

mar 21/02/2017 - 11:23

"Tenez, puisque vous aimez les références, un article qui cite un travail universitaire sur les supposés bénéfices importants de la restauration d'une rivière:
http://www.hydrauxois.org/2016/12/touques-comment-le-lobby-de-la-peche-…;
Pas de rapport avec la question... je parlais juste de références qui vous légitiment à avancer que le paysage est plus 'joli" avec des seuils préservés (ce qui est totalement subjectif) ou à avancer des hypothèses de ralentissement des crues (les seuils ne modifient pas le débit et sont généralement transparents pour une crue centennale, voire pour une décennale). Donc oui à une méthodologie concertée sur ces aspects "services écosystémiques", plutôt qu'une accumulation d'idées reçues que tout citoyen peut se targuer de faire (ou de critiquer). Reste donc à savoir qui sera légitime à vos yeux pour le faire...

"Ce qui est bien en démocratie, c'est que l'on peut monter sur un tonneau (ou écrire sur un forum) et proclamer qu'il est d'intérêt général d'interdire ou d'autoriser ce que l'on veut"
c.q.f.d !

"oui à une méthodologie concertée sur ces aspects "services écosystémiques""

Alors s'il y a consensus là-dessus, c'est l'essentiel. On attend donc que la programmation publique nous propose quelque chose en mode "science participative". Une fois l'outil validé comme inclusif de l'ensemble des "services" possibles pour les citoyens, capable d'objectiver lesdits services et testé de manière satisfaisante sur diverses situations concrètes, il suffira de l'appliquer en routine aux chantiers dont l'intérêt est débattu.

D'ici là – et sauf si vous nous présentez un tel outil déjà co-construit, validé, testé, appliqué –, on en déduira que toute proclamation sur les services écosystémiques résultants de tel ou tel choix programmatique relève du voeu pieux de son rédacteur, et non d'une démonstration que l'on pourrait consulter pour vérifier son bien-fondé.

"je parlais juste de références qui vous légitiment à avancer que le paysage est plus 'joli" avec des seuils préservés (ce qui est totalement subjectif) ou à avancer des hypothèses de ralentissement des crues (les seuils ne modifient pas le débit et sont généralement transparents pour une crue centennale, voire pour une décennale)"

Pour les paysages, c'était "divers" plutôt que "joli". Pas vraiment de référence. Il nous semble qu'entre une rivière aménagée et une rivière renaturée, on perdra dans le second cas divers plans d'eau et profils d'écoulement qui n'existent (quasiment) pas dans la nature, donc on perdra plutôt de la diversité paysagère. Plutôt dans l'esprit de cette fiche du programme "paysage" du ministère de 'environnement (mais c'est difficile à objectiver, certainement)
http://www.paysage-developpement-durable.fr/IMG/pdf/pdd_fiche_patrimoin…

Pour les crues, n'importe quel cours d'hydraulique fluviale (mais sûr qu'un moulin ne protégera pas Paris de la prochaine cure centennale !).

"Il nous semble qu'entre une rivière aménagée et une rivière renaturée, on perdra dans le second cas divers plans d'eau et profils d'écoulement qui n'existent (quasiment) pas dans la nature, donc on perdra plutôt de la diversité paysagère."

Vous avez peut être oublié que les rivières savent très bien présenter des profils et paysages variés si on les laisse faire : méandres, tresses, cascades, successions radiers-plats, rivières engorgées, de plaine, de plateau, etc... mais c'est sur que ça ne vaut pas un beau chenal à étages... Je vous encourage donc à sortir de votre territoire, d'ouvrir un peu vos œillères et de vous balader un peu au bords des rivières et lacs et vous verrez que les "divers plans d'eau et profils d'écoulement" existent encore bel et bien, même dans notre "nature".

Justement, il existe déjà une diversité naturelle des écoulements sur nos rivières. Chaque cas est particulier, une rivière de plaine peut sans doute être étagée à plus de 80% et présenter un profil un peu ennuyeux. Mais sur bien d'autres, la rivière présente déjà des écoulements naturellement variés, ajouter un radier, un plat, une tresse, etc. à d'autres qui existent déjà à l'amont et à l'aval des ouvrages n'est pas en soi un gain majeur pour la diversité paysagère. Faire disparaître le plan d'eau est en revanche une perte que la rivière ne produira plus toute seule.

Mais justement, ce genre de chose pourrait s'objectiver à échelle d'un petit cours d'eau ou d'un tronçon. Il n'est pas trop difficile de comptabiliser les formes fluviales. N'était-ce pas d'ailleurs un des résultats possibles du protocole macro-échelle Syrah, que l'on voit fort peu appliqué chez nous?

nv (non vérifié)

mer 22/02/2017 - 12:57

"Pour les crues, n'importe quel cours d'hydraulique fluviale (mais sûr qu'un moulin ne protégera pas Paris de la prochaine cure centennale !)."

Vous entendez par là que les retenues de moulin ont un effet écrêteur sur les crues?

On parle plutôt d'écrêtement quand on peut stocker ou divertir un débit, on évoquait ci-dessus le ralentissement. Les rares fois où l'on a vu des modèles hydrauliques appliqués à des ouvrages particuliers, le fait est qu'ils ralentissent l'écoulement pour les crues à temps de retour fréquent (par effet de dissipation d'énergie dans le ressaut). Après chaque cas est particulier, et oytre l'effte de la chute, il faut examiner la connexion entre le remous amont / les annexes hydrauliques des ouvrages et des champs d'expansion.

Prenons ici la rivière Cousin et la commune d'Avallon, principal enjeu urbain. Il y a une trentaine d'ouvrages en amont de la ville, des moulins, des étangs, un lac. Le socle du Morvan est imperméable et il répond assez vite aux crues. Donc oui, nous pensons qu'à pluviométrie égale, le profil de crue ne serait pas le même pour la ville si tous les ouvrages amont étaient arasés ou dérasés en faveur du libre écoulement. Pourquoi faudrait-il penser le contraire ?

Cela dit l'effet est dans l'ensemble modeste, puisque ces ouvrages ne sont pas conçus pour écrêter. Mais quand on voit des PAPI ou des PPRI qui interdisent parfois de manière stricte toute aggravation du risque inondation (par exemple interdire des remblais même très modestes chez des particuliers), pourquoi d'autres effets eux aussi modestes seraient tolérés dans ce cas?

PS : on ne garde pas les archives classées de notre revue de presse, mais lors du récent épisode de crue au sud de l'Ile-de-France (Essonne, Orge, Loing, etc.), certains gestionnaires avaient affirmé que la gestion des clapets et des canaux de dérivation leur avait permis d'atténuer les choses, de mémoire plutôt sur les rivières du 91. Ce serait à retrouver et à vérifier, bien sûr.

obi wan (non vérifié)

ven 24/02/2017 - 14:50

Savez-vous qu’il existe des plans d’eau d’origine naturelle (anciennes cuvettes glaciaires) ? Ils sont pour la plupart maintenant " artificialisés" et /ou rehaussés, mais ils étaient là certainement avant nous.
"Ennuyeux ", ça dépend pour qui... Personnellement, la variabilité naturelle ne m’ennuie pas, contrairement à un ouvrage bétonné au beau milieu de paysages bucoliques ;). Mais bon, chacun sa vision de l’esthétique ou de la diversité encore une fois. Dans le même genre, on pourrait reconnaitre une diversité paysagère toute spécifique aux vallées de la Chimie, de la Ruhr… est-ce pour autant à rechercher et à encourager ?

Pour la méthodologie d’évaluation objective d’évaluation de l’Hydro-morphologie, le SYRAH a été développé par l’IRSTEA, Ex-CEMAGREF. Par contre, sa mise en œuvre est plutôt à charge de l’Ex-ONEMA devenu AFB ou des AE… Il faut reconnaitre qu’ils sont assez peu loquaces sur la communication de ces données.

Sinon, sans relancer le débat et un peu à côté… La disparition récente de Jean Verneaux, éminent scientifique (lui aussi), fait émerger plusieurs témoignages qui rappelle son attachement à la préservation des écosystèmes :
http://france3-regions.blog.francetvinfo.fr/vallee-de-la-loue/2017/02/2…

Son coté conversationniste peut vous déplaire mais il est le "papa" de l’IBG(N) et des méthodes d’évaluation de la qualité des eaux fondées sur les bio-indicateurs. Comme quoi tous les scientifiques ne sont pas tous du même avis sur la notion de "bon état", ou encore "l’état de référence", et ceci en toute objectivité !!

On a critiqué l'usage (à notre avis fétichiste) de la biotypologie théorique de Verneaux par les fédés de pêche et l'Onema, mais on a du respect pour l'homme, et de l'intérêt pour sa thèse, une des rares à objectiver l'état des rivières dès les années 1960-70. Si un tel travail avait été mené ailleurs et poursuivi dans le temps, on aurait des données fiables de long terme pour essayer de modéliser l'évolution locale du vivant. Ce qui est fort rare, hélas, et même sur ces rivières comtoises, le conseil scientifique mis en place par la préfecture et l'AERMC (suite au mortalités de truites des années 2010) a déploré récemment le fait que la bancarisation / homogénéisation est défaillante.

Sur l'autre point : le patrimoine industriel est un domaine qui intéresse aussi beaucoup de monde, oui, quoique généralement sans rapport direct avec l'écologie. Mais les friches industrielles elles-mêmes ne sont pas toujours sans intérêt, voyez par exemple les anciennes carrières (que l'on remblaie parfois à tort pour "renaturer" alors que leur front de taille est un habitat pour nombre d'espèces, souvent confondu avec les zones pionnières de recolonisation chez des rapaces par exemple). Le vivant est très inventif et opportuniste, il faut faire du cas par cas plutôt que d'opposer a priori nature intacte et nature modifiée.

Sinon, à partir du moment où une rivière possède des retenues et plans d'eau appelés à disparaître pour les remplacer par des formes naturelles d'écoulements déjà présentes, cela semble difficile d'affirmer que cette disparition augmentera la diversité paysagère (que l'on aime ou pas lesdits plans d'eau, ce qui est une autre question). La notion même de "paysage" inclut l'empreinte humaine dans son façonnement. Au vu des témoignages multiples sur la RCE depuis le PARCE 2009, il est peu douteux que l'attachement des riverains aux retenues et canaux est souvent une réalité locale, pour l'essentiel de nature esthétique. On peut dire que c'est du conservatisme mal placé (le site du ministère parlait avec un certain mépris des nostalgies de "cartes postales", ce qui semble avoir été effacé depuis l'automne dernier), mais comme ce genre de reproche est à géométrie variable et qu'on pourrait aussi bien critiquer un certain conservationnisme comme étant une forme de nostalgie, le mieux serait simplement d'écouter davantage ce que disent et souhaitent les gens... sans exclusive.

obi wan (non vérifié)

jeu 02/03/2017 - 09:36

le lobbying continue !
https://www.franceinter.fr/emissions/planete-environnement/planete-envi…

Comme par hasard, les solutions alternatives à l’arasement ne sont pas mentionnées. Encore de la désinformation : "Mais le gouvernement a décidé d’appliquer à la règle une directive européenne : il faut détruire tous les obstacles à la circulation des poissons. Il y en aurait 80 000 en France".

Hydrauxois (non vérifié)

ven 03/03/2017 - 14:18

En réponse à par obi wan (non vérifié)

C'est en effet très imprécis (nota : la journaliste ne nous a pas contacté).

" les solutions alternatives à l’arasement ne sont pas mentionnées"

Il faudrait surtout que leur coût et leur niveau de financement soient expliqués! Car soyons clair, l'essentiel du blocage est venu de là, on ne serait pas à couteau tiré si le principal financeur payait entre 80 et 100% des solutions de franchissement, avec montage sur le reste à charge. Il est établi de multiples manières (documents de la DEB, des agences, des syndicats, etc.) que les solutions d'arasement et dérasement ont été systématiquement mises en avant depuis le PARCE 2009.

Nulle part nous n'avons entendu le discours "on veut rétablir la continuité mais on le fera à partir des niveaux d'acceptation des gens, vu les coûts de travaux en rivière, la dimension d'intérêt général et la création d'une servitude, les frais seront pris en charge quelle que soit la solution choisie. On préfère a priori le plus haut niveau d'efficacité écologique, mais on n'insistera pas s'il y a attachement à l'ouvrage, car l'écologie n'est pas la seule dimension de la rivière donc ne peut être le seul angle de décision de son gestionnaire".

Tenez ce discours et, oh miracle, le "lobbying" va disparaître! On pourrait même travailler ensemble (comme on l'a fait sur les 3 seuls chantiers de franchissement ici, alors que les MO étaient plutôt réticents). Ne le tenez pas, et le "lobbying" continuera d'exprimer les protestations des premiers concernés. Et surtout de faire constater une évidence : les particuliers ne claqueront pas des dizaines à des centaines de milliers d'euros pour une charge publique, aucune personne sensée ne peut appuyer une réforme sur ce genre d'attente (pas seulement sur la continuité).

"Nulle part nous n'avons entendu le discours "on veut rétablir la continuité mais on le fera à partir des niveaux d'acceptation des gens, vu les coûts de travaux en rivière, la dimension d'intérêt général et la création d'une servitude, les frais seront pris en charge quelle que soit la solution choisie. On préfère a priori le plus haut niveau d'efficacité écologique, mais on n'insistera pas s'il y a attachement à l'ouvrage, car l'écologie n'est pas la seule dimension de la rivière donc ne peut être le seul angle de décision de son gestionnaire"."

Vu votre histoire, on comprend votre attachement à défendre le patrimoine hydraulique et plus précisément les moulins. Le point qui surprend, si l'on en croit vos dires, c'est que votre lobbying à conduit (indépendamment de votre volonté ? - Vous avez dit ne pas être opposé à la continuité , si elle est globalement réfléchie et concertée) à un changement législatif "radical", globalement préjudiciable aux milieux.
Bref, à défaut de faire respecter son droit, on change la loi... et qui parle de démocratie ?

En effet, nous ne sommes pas satisfait sur le fond du dernier choix (L 214-18-1 CE), comme nous l'avons exprimé. Cette option du "tout ou rien" n'a pas beaucoup de sens en écologie. Elle va créer de l'inégalité et de la complexité, là où nos adhérents ont déjà un sentiment d'injustice et d'incompréhension. Sa seule vertu (involontaire) est d'obliger à remettre les choses à plat.

Cela dit, vous parlez d'un dysfonctionnement démocratique, mais où se situe-t-il ?

Nous en arrivons là (changement de la loi et recours en justice) parce que le Ministère n'a pas été capable de mettre tous les acteurs (pas seulement les moulins) autour d'une table. Quand une réforme soulève des problèmes (retard, opposition, solvabilité, contentieux, etc.), on se met normalement d'accord sur la réalité de ces problèmes et sur un train de solutions acceptables. Comme le rappelle une discussion parallèle sur ce forum, d'un claquement de doigt, la FNSEA a obtenu du Ministère la cartographie des cours d'eau : il y avait certes des problèmes de curage et drainage (donc pourquoi pas préciser ce qui est cours d'eau et ne l'est pas), mais moins nombreux et en soi moins urgents (car pas de délai légal) que les problèmes de continuité. D'un autre claquement de doigt, on peut aussi rappeler que des "bonnets rouges" ont obtenu le démantèlement des écoportails avec l'énorme coût pour la collectivité que l'on sait et le message écologiquement illisible vers l'opinion.

A côté de cela, il y a 12 partenaires nationaux au moratoire (pas la FNSEA certes...), qui demandent une réflexion de fond sur la continuité, mais le Ministère ne juge pas utile de leur proposer autre chose qu'une "charte des moulins" (soit un texte purement symbolique, pour 2 partenaires sur 12). Ce n'est pas responsable de laisser pourrir la situation, surtout quand l'un des premiers griefs des institutions concernées est qu'elles ne sont pas entendues dans la concertation amont, voire pour certaines pas consultées du tout. De plus, cela ne peut pas être au niveau des syndicats / parcs qu'on gère le problème, car en France tout le monde dépend des arbitrages DDT-M sur le réglementaire, AFB sur le diagnostic écologique, Agence sur le financement. Si cela ne bouge pas "au-dessus", le terrain se contente d'observer des blocages (= ouvrages sans solution viable, délai et financement pas adaptés au nombre d'ouvrages à traiter) sans pouvoir réellement proposer de solution.

Maintenant, cela paraît difficile de continuer ainsi. L'instruction ministérielle de 2015 aux préfets pour stopper les chantiers sur les cas problématiques est toujours en vigueur. La loi a créé en 2016 et 2017 le délai de 5 ans, la protection de la dimension patrimoniale, l'exemption pour énergie, la promotion du stockage d'eau pour usages locaux, etc. Le rapport d'audit du CGEDD, transmis à la ministre mais pas rendu public, comporte probablement un ensemble des critiques et préconisations. De toute évidence, il faut repréciser globalement les choses. Comme il y a eu également des travaux scientifiques sur la période 2012-2017, des retours de terrain sur quelques milliers d'ouvrages traités, des exemples dans les autres pays européens, en profiter aussi pour réfléchir sur le fond : comment on priorise mieux les obstacles à traiter et les espèces à protéger, comment sur un bassin on diagnostique efficacement le poids de la discontinuité longitudinale dans les indicateurs biologiques de qualité, comment on organise la gouvernance avec les usagers impactés. Des choses ont été publiées, des outils ont été produits ou affinés, des guides de plus en plus précis de restauration physique ont été édités, donc cela doit devenir des réalités de gestion. Mais cela demande plus de temps et de moyens pour faire correctement les choses : on peut imaginer que les agents des EPAGE et EPTB ont des souhaits de formation et que les BE doivent avoir des certifications (pour éviter certains rapports quasi-inutiles avec des méthodologies disparates d'une rivière l'autre), la solvabilistion des solutions de franchissement implique un budget réaliste, tout cela est incompatible avec le message toujours officiellement en vigueur ("les listes 2 sont toutes justifiées, tous les ouvrages d'une L2 doivent être traités à égalité, il faut aller vite car le bon état au sens DCE en dépend").

Bref, le débat n'est pas "pour ou contre la continuité" ni "garder ou supprimer la continuité", mais comment arriver à une continuité écologiquement efficace, économiquement proportionnée et socialement acceptée, sans laisser encore penser qu'une de ces conditions serait facultative. Et à dire vrai, si l'on arrive à trouver une voie satisfaisante, la notion même de rivière classée (ou le mode actuel de classement) serait à repenser car le traitement des discontinuités demande certainement une approche plus fine. Au lieu de définir 1000 ouvrages à traiter parce qu'ils sont répartis sur X rivières classées, mieux vaut peut-être en définir 1000 qui maximisent des gains écologiques (parce qu'ils sont à l'aval de noeud de connectivité, bloquent des grands bassins amont, concernent des espèces en danger critique d'extinction, etc.) tout en étant diversement répartis. Sachant qu'à terme, toutes les rivières sont concernées, mais ce n'est pas en 5 ou 10 ans qu'on change plusieurs siècles d'aménagement, et ce n'est pas toujours utile d'ouvrir vers des habitats tant qu'ils sont encore chimiquement pollués ou physiquement dégradés.

obi wan (non vérifié)

mar 20/03/2018 - 15:03

Pour faire dans la continuité de ces débats, une proposition de loi est présentée à l'assemblée nationale (déjà passée par le Sénat), tendant à préserver et encourager la capacité hydroélectrique des moulins :

http://www.assemblee-nationale.fr/15/propositions/pion0751.asp

Avec des modifications importantes sur le Code de l’environnement ; remettant en cause l'essence même des obstacles...extraits choisis :

- L’article L. 213-10 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :« Les moulins tels que définis au III de l’article L. 211-1 exploitant l’énergie hydraulique pour la production d’hydroélectricité, ne sont pas considérés comme exerçant une activité taxable au sens de la présente sous-section. »

- Après le premier alinéa du 1° du I de l’article L. 214-17 du même code, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Un cours d’eau, une partie de cours d’eau ou un canal ne peut être considéré comme jouant le rôle de réservoir biologique que si sont précisément identifiés les zones de reproduction ou d’habitat des espèces et les besoins des zones à réensemencer, et si la libre circulation des espèces entre ces différentes zones est effective. La liste établie en application des dispositions ci-dessus cesse de produire ses effets à défaut de révision sur la base de ces critères, au plus tard pour le 31 décembre 2020. »

- Après l’article L. 214-17 du même code, il est inséré un article L. 214-17-1 ainsi rédigé :« Art. L 214-17-1. – Seuls les barrages peuvent être considérés comme des obstacles à la continuité écologique au sens du 1° du I de l’article L. 214-17. »« Sont considérés comme des barrages au sens de l’alinéa précédent les ouvrages édifiés en lit mineur d’un cours d’eau, qui en occupent toute la largeur, et dont la crête présente une hauteur supérieure à deux mètres mesurée verticalement par rapport au niveau du terrain naturel en amont et à l’aplomb de la crête. ».

Non, non, vous ne rêvez pas, seuls les barrages vrais seraient donc des obstacles, A CONDITION que ces derniers possèdent une hauteur d'au moins 2mètres.
euh...